Récit positif de mon avortement
- F.
- 20 sept. 2017
- 5 min de lecture
J'ai regardé les différents témoignages mis en ligne sur le site. Je sais qu'ils cherchent à pointer du doigt les soucis rencontrés par les femmes désirant pratiquer une IVG, mais je pense qu'un témoignage positif peut être intéressant aussi. Ne serait-ce que pour donner de l'espoir, récompenser les gens qui font bien leur travail et ne pas dégoûter les femmes qui sont en train de prendre cette décision. Pour ma part, j'ai pratiqué une IVG médicamenteuse il y a quelques jours (deux semaines à peine) dans un hôpital de banlieue parisienne. J'ai eu du retard dans mes règles, et bien que ça me soit déjà arrivé plusieurs fois vu que mes cycles sont irréguliers, là j'ai su que c'était différent et que j'étais enceinte, je l'ai senti. Mais je me voilais la face, je m'inquiétais mais je préférais me mentir que d'avoir à assumer ça. J'avais peur... de ce que je risquais de vivre, de ce qu'on allait penser de moi, des réflexions. J'ai fini par en parler à des amis et à mon copain, ça m'a rassurée. J'ai donc fait un test de grossesse. Toute seule, chez moi, en stress. Il était positif. J'ai paniqué, je ne savais pas quoi faire. J'ai cherché sur Internet les adresses des plannings à Paris. Rien n'était clair, je n'en ai trouvé que trois, tous fermés ce jour là. Je ne savais pas vers qui me tourner. J'ai donc décidé de prendre un rendez-vous en urgence avec mon médecin traitant. Coup de bol, j'ai eu un rendez vous le jour même. Il a été super. Il m'a tout expliqué en détails : les différentes méthodes, le pour et le contre pour chacune, le déroulement... Comme il savait que je n'avais pas trop de moyens (fraîchement diplômée, pas vraiment de travail et en attente du remplacement de ma carte vitale qui a été volée), il m'a redirigée vers le planning de l'hôpital pour être sûr que je n'aurais rien à payer ni même à avancer. Il ne m'a pas jugée une seule fois. Il n'a eu aucune remarque déplacée. Il n'a pas essayé de me faire changer d'avis. Mais il s'est quand même assuré que j'étais sûre de mon choix et m'a conseillé d'y réfléchir encore vu que c'était très récent. Il m'a dit d'en parler avec mon copain aussi. "Pour être vraiment sûre de votre choix, pour ne pas que vous le regrettiez". Je suis sortie de la consultation rassurée, avec un téléphone à appeler ainsi que l'adresse, en sachant quoi faire et le mail de mon médecin pour le tenir au courant. C'était un mardi. J'ai eu un rendez-vous pour l'échographie au planning pour le vendredi. Ça a été très rapide. J'étais un peu stressée à l'idée de ce rendez-vous. Je me suis rendu compte qu'il y avait plein de questions auxquelles je n'avais pas pensé. Une fois arrivée sur place, on m'a fait patienter cinq à dix minutes dans une salle d'attente puis une femme est venue me chercher. C'était la psy. Elle m'a amenée dans son bureau et la première chose qu'elle m'a dit c'est que cet entretien n'était pas obligatoire mais fortement conseillé. J'ai donc décidé de rester et de parler de mon ressenti avec elle. Elle m'a posé des questions pour voir dans un premier temps ce que je savais de l'IVG. Puis elle s'est intéressée à mon histoire, savoir comment j'étais tombé enceinte et pourquoi je voulais avorter. À aucun moment elle n'a essayé de me faire changer d'avis. À aucun moment je me suis sentie jugée. Cet entretien m'a finalement été utile et m'a conforté dans mon choix. Il m'a rassurée et m'a permis de me sentir moins honteuse. On m'a renvoyée dans la salle d'attente en me disant que le médecin allait m'appeler. Plus d'une heure après, j'étais encore assise au même endroit. Cependant, toutes les infirmières et aides-soignants qu'on voyait passer étaient de bonne humeur, souriants et polis. Ça fait toujours plaisir. Le médecin arrive enfin. Elle s'excuse pour l'attente. Une fois dans son cabinet, on discute. Elle m'explique elle aussi ce qu'elle va faire, ce qui va se passer par la suite, discute un peu avec moi pour connaître mon histoire... Elle m'installe sur la table pour l'échographie. Elle fait attention à ne pas me faire mal, me demande si je veux voir, si je veux qu'elle m'explique et me donne les détails. J'ai préféré ne pas voir, j'avais peur que ce soit trop violent. Elle m'a juste expliqué oralement, dans les grandes lignes. On s'est réinstallées a son bureau et on s'est mises d'accord pour une IVG médicamenteuse. Elle m'a expliqué qu'on pouvait le faire à domicile ou à l'hôpital, en insistant bien sûr les contraintes qu'il y avait à le faire à domicile. On ne sait pas trop comment ça se passe, il faut impérativement être accompagnée de quelqu'un, ce quelqu'un doit pouvoir nous amener d'urgence à l'hôpital s'il y a un soucis, si c'est douloureux on n'a pas forcément les anti-douleurs nécessaires... Je tiens à souligner ce moment car, souvent, dans les témoignages, je me rends compte que des femmes le font toutes seules chez elles sans savoir ce qui les attend. Et si j'avais fait ça chez moi, mon expérience n'aurait sûrement pas été la même. J'ai donc décidé de le faire à l'hôpital. On a pris rendez-vous avec une infirmière adorable pour la semaine d'après. J'ai du revenir à l'hôpital le mardi suivant pour prendre les premiers médicaments. Et c'est le jeudi que je me suis fait hospitaliser. Je suis arrivée à l'hôpital le jeudi matin. Équipée comme il le fallait suite aux indications données par une feuille qui m'avait été donné le mardi : un repas léger pour le midi, de quoi m'occuper (livres, mots croisés), un jogging et un gros pull dans mon sac. Et encore une fois, le personnel a été adorable. On m'a installée aussi bien que possible. Plusieurs aides soignantes sont venues me voir, pour parler, pour savoir si j'allais bien. Je suis assez solitaire et là je préférais être seule, mon désir a été respecté. Mais je savais que si j'avais besoin, il y avait du monde autour. Je pouvais me promener dans les couloirs de l'hôpital. Ça a été douloureux, je ne nie pas. Très douloureux, surtout au début. La première heure. Puis j'ai dormi. Et quand je me suis réveillée j'allais mieux. Le personnel me rassurait : "c'est normal d'avoir des nausées", "si vous avez trop mal dites-le, on vous redonnera des anti douleurs", "allez vous promenez un peu"... Quatre heures après, je ne l'avais toujours pas expulsé. Ils m'ont dit qu'il fallait reprendre des médicaments. J'ai flippé (encore), ils l'ont vu. "Ne vous inquiétez pas, c'est beaucoup moins douloureux que la première prise et en général ça sort de suite après". Ils avaient raison : une heure après, c'était expulsé et les douleurs avaient été moindres. J'ai discuté avec eux. A domicile, c'est beaucoup plus long en général, il n'y a de deuxième prise. On peut donc passer la journée à souffrir, à se demander si ça a marché, à angoisser... Tout ça, sans être entourée. Ça doit être horrible. Ils m'ont gardé une heure de plus, pour être sûrs que tout allait bien. J'ai vu le gynécologue, malheureusement ce n'était pas la même. C'était un homme cette fois ci. Mais là encore, tout s'est bien passé. Et je suis rentrée chez moi, soulagée. Je ne dis pas que se faire avorter est quelque chose de facile. Loin de là. J'en ai souffert physiquement, moralement et psychologiquement. Mais je pense que ça fait parti du processus "normal" dans ces cas là. Ce n'est pas un acte anodin. Et j'y pense beaucoup, je me pose encore des tas de questions. Mais comparé à la plupart des témoignages que j'ai pu lire ou voir, j'ai l'impression de très bien vivre cet acte. Et je pense que c'est en grande partie grâce au personnel médical que j'ai eu la chance d'avoir et qui m'a bien accompagnée dans cette aventure pour essayer de me le faire vivre avec le moins de traumatisme possible.
Posts récents
Voir toutC'était il y a un peu plus de trois ans, j'avais 17 ans à l'époque, cela faisait déjà plusieurs années que j'expérimentais la sexualité....
Je me suis rendu compte que j'était enceinte l'année dernière à cette période même, j'avais 20 ans. Je savais que j'avais fait une...
J'ai avorté le 9 janvier 2017. Choix difficile à prendre mais néanmoins nécessaire. Je suis tombée enceinte par accident car je prenais...
Comments