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Injustice

  • Nnara
  • 6 août 2017
  • 3 min de lecture

Tout d'abord, j'aimerais commencer par dire que je suis québécoise et bien que le système de santé soit similaire à celui de la France dans certains aspects, je suis chanceuse d'être dans une ville étudiante qui prend soin de ses étudiants. En juillet 2016, mon père adoptif est décédé dans un accident de moto. Le deuil est affligeant pour moi, mais surtout pour ma mère. Je me retrouve donc à jongler entre ma perte et ma maman, que je soutiens émotionnellement. Mon copain, qui est parisien, avait un billet d'avion pour le surlendemain. Dans l'aveuglement, je lui dis tout de même de partir... Que je peux m'en sortir seule... Grave erreur. Il part deux semaines... Et pour moi, il part une éternité. En même temps, je ne lui en veux pas, et son absence me permet de me consacrer à ma mère et aux funérailles. À son retour, je suis en fin d'ovulation. C'est un détail qui me sort de l'esprit à ce moment, parce que je porte un stérilet de cuivre. On fête son retour, je peux enfin m'abandonner dans ses bras, me noyer dans mon chagrin qui a été mis de côté pour supporter ma famille. Un mois plus tard, on part en camping. Je me rappelle clairement m'être dit que la date était mal choisie car j'aurai mes règles à ce moment. Pourtant... rien. Et je suis réglée comme une horloge suisse. Trois jours plus tard, je fais le test. Il est positif... J’écris à mon copain. Il est coincé au laboratoire tard. J’écris, mot pour mot : « Ligne très pâle sur le test. Ça peut être positif ou négatif. Je reteste demain matin avec la première urine. » J’arrive chez lui ce soir-là. Je me rappellerai toujours de son sourire. Traits fiers sous la fumée de cigarette qui s’échappait de sa bouche. Il fait beau. On s’assoit sur le balcon. On contemple la vie. On est heureux que je sois enceinte. C’est un miracle, non ? Moins de 2% de chance ! On parle. On devient spirituels, puis superstitieux. C'est étrange que mon père soit mort... et que là je tombe enceinte ! On n’a pas dormi de la nuit. Deuxième test : positif. C’est clair. Mon copain veut le garder. Je le lui laisse. Je me couche dans le lit. Je croise le regard de mon amoureux. Il sourit. Il est brillant. Et moi aussi. Notre nid chaud se ferme sur nous deux. C’est notre univers, notre rêve, pour un bref instant du moins. J'appelle la clinique de planning familial. J'ai un rendez-vous dans la journée. L'accueil est fantastique, je me sens bien et en sécurité. On me fait passer un troisième test, puis une prise de sang. On essaie une échographie, mais on ne trouve pas l'embryon... Ce qui peut être inquiétant et signifier une grossesse ectopique (c'est à dire extra-utérine). Je passe donc une batterie de tests sur les semaines suivantes, toujours dans la tendresse et la sécurité des lieux. On rencontre même mon copain pour discuter avec lui des étapes à venir si on fait le choix d'avorter. En aucun cas je n'ai eu l'impression qu'on me poussait dans un sens ou dans l'autre. Je menais la danse. Ce qui a vraiment été difficile dans notre choix c'est qu'on est tous les deux très enthousiastes à l'idée d'avoir des enfants. Ils nous ont permis de prendre une semaine pour réfléchir... parce que de toutes façons l'embryon était trop petit pour la méthode d'avortement que j'avais choisie (c'est à dire l'aspiration). Puis, au bout de la semaine, j'ai pris le rendez-vous fatidique. La procédure a été douloureuse, physiquement et mentalement, mais les intervenantes, les infirmières et les médecins ont été fantastiques. Je me compte réellement chanceuse après avoir vu et lu certains témoignages. Et pour moi, je souhaiterais que tous les femmes se sentent aussi bien que je me suis sentie dans une épreuve qui peut être aussi écrasante.


 
 
 

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© 2017 par Marinette

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