"Il s'est implanté derrière le stérilet alors la fausse couche, n'y comptez pas"
- Juliette
- 15 juin 2017
- 4 min de lecture
C'était il y a un an. Je portais un stérilet. Je n'ai jamais fait particulièrement attention à mon cycle menstruel. Et puis un jour, mon copain me dit "Ca fait longtemps que tu n'as pas eu tes règles". Certes, sachant que ma colocataire et moi sommes réglées comme du papier à musique, je lui ai simplement demandé quand elle les avait eues. Deux semaines, deux semaines de retard. Ok, mais sous stérilet c'est impossible donc je me dis que le retard est simplement dû au stress du mémoire que je dois rendre dans un mois. J'ai mal aux seins. Finalement, quelques jours plus tard je décide d'aller acheter un test de grossesse. J'y vais plutôt sereine, en me disant "Mais tu as un stérilet, c'est impensable". Loupé, je fais le test, c'est positif. La pharmacienne m'avait dit "Si c'est positif, revenez en achetez un autre pour être sure, il peut y avoir des faux positifs". J'y retourne. Deuxième super test Clearblue avec les jours, semaines et toutes les précisions possibles qu'on n'a pas envie de connaître. Positif et plus de trois semaines. J'avais gagné le gros lot : un mémoire, deux jobs étudiants et un test positif. Le soir même, j'appelle mon copain. On ne s'est pas posé de questions, la décision était claire pour nous deux. On avait choisi d'avorter à 21 heures le soir-même. Paniqués, nous sommes partis aux urgences. On nous a répondu qu'on ne pouvait rien faire et qu'il fallait revenir le lendemain. S'en sont suivies deux semaines de panique. Deux très longues semaines éreintantes. Vivant en Belgique, nous connaissions peu le système médical. Le matin même à 8 heures, nous sommes partis dans un premier planning familial. Une fois la situation expliquée à l'accueil, on me dit que je suis à plus ou mois six-sept semaines et que cela me coûtera environ 1000 euros. On m'indique alors un autre planning qui pratique les IVG un peu moins chères. On s'y rend. Nous avons tout de suite un rendez-vous avec une gynécologue, parce que je portais un stérilet. La gynécologue m'ausculte. Les jambes écartées, échographie par voie vaginale. La première. La gynécologue regarde longuement, fait tourner le bâton et dit "C'est bizarre, on ne voit rien". Elle explique ensuite les deux possibilités : c'est trop petit ou c'est ailleurs (c'est à dire pas dans mon utérus). Prise de sang effectuée pour vérifier si je suis bien enceinte. Le lendemain les résultats tombent : "Enceinte, grossesse non évolutive (fausse couche ou extra utérine)". On me renvoie alors vers l'hôpital pour la grossesse extra utérine car je devrai me faire opérer. La gynécologue en question a pris rendez-vous pour nous six jours plus tard. Et me dit ensuite : "Si jamais vous avez un peu mal, vous filez à l'hôpital. Les grossesses extra-utérines c'est dangereux". Noté, soit. Je quitte ce lieu avec l'impression d'avoir une bombe à retardement quelque part dans mon corps. D'une certaine manière, j'étais soulagée. Je ne vivais plus une IVG, plus de question à se poser. J'étais enceinte mais je ne pouvais pas le garder et ma volonté n'avait rien à voir là dedans. Six jours passent, et c'est long six jours quand on sait cela. Six jours plus tard donc, nous voici à l'hôpital, je m'attends à une opération directe vu ce qu'on m'avait annoncé. Que nenni, une gynécologue m'ausculte encore une fois après nous avoir écoutés très brièvement. "Oh bah il est là, le voilà". "Ah j'ai un rythme". Non impossible, je bégaye tant bien que mal que non, non et non. Si si, il est dans l'utérus. Et elle me dit calmement "Oh bah il s'est implanté derrière le stérilet alors il n'y aura pas de fausse couche hein. Donc vous voulez faire quoi ? On part sur une procédure IVG ? Je vous enlève le stérilet maintenant ?" Autant de questions auxquelles je n'ai pu donner de réponses instantanées. Après avoir acquiescé pour le retrait du stérilet, elle se place devant moi, les jambes ouvertes, elle insère le spéculum. Le téléphone sonne. Elle répond. J'ai les jambes écartées face à elle, je viens d'apprendre que je suis enceinte, que c'est viable et elle répond. Et raconte ce qu'elle va faire de son week-end. Je suis sidérée, choquée et je ne sais pas quoi dire. Elle raccroche et me le retire. S'en suit une nouvelle procédure, la procédure IVG. Six jours de réflexion. Encore six putain de longs jours "à réfléchir". On me donnait le choix. Un rendez-vous psy. Une semaine plus tard, on m'autorise à prendre les médicaments, je dépassais tout juste la limite mais on me les a donnés. A prendre à la maison. Sachant que je vomissais depuis plus d'une semaine, on me conseille de le faire par voie vaginale. Nous étions chez moi, je les ai pris. J'ai attendu. On ne m'avait pas prévenue. J'avais peur de la douleur mais ca allait, on ne m'avait pas prévenue de la quantité de sang que j'allais perdre. J'avais l'impression de pisser du sang pendant trois jours entiers. Au bout de deux jours après les médicaments, je sens quelque chose tomber. C'était fini. Un dernier rendez-vous deux semaines plus tard à l'hopital avec une autre gynécologue, on me confirme qu'en effet il n'y a plus rien. C'était fini. Pendant deux longues semaines, j'ai mis mon cerveau en off. Je savais ce que je voulais et ce que je ne voulais pas, alors on a agi en conséquences. On suit les procédures, les jambes écartées devant les médecins, on écoute, on dit rien. Je voulais seulement que ca se termine. C'était enfin fini. On ne prévient pas assez. Je n'étais pas prête à faire face à cette gynécologue incompétente, je n'étais pas prête à l'après. C'était fini et on se dit que le pire est passé. Mon copain l'a vécu comme tel. Moi pas. Après c'est vide. C'est vide et ça le reste longtemps. On s'habitue et on y pense. On ne regrette pas et c'est incompréhensible pour l'entourage. Non je n'ai jamais regretté, mais oui ce n'est pas facile tous les jours. Les émotions sont diverses et indicibles. Un mois plus tard, je suis partie chez un psy. J'en parle beaucoup autour de moi, notamment pour avertir sur les moyens de contraceptions. Juste passer le mot, apprendre à écouter son corps c'est important. Aujourd'hui, je souhaite remettre un stérilet. Trois gynécologues ont refusé de me le poser. Une a accepté. Depuis longtemps, j'avais envie d'écrire et je n'ai su le faire qu'avec un peu de recul. Je vous remercie pour ce site.
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